Françoise Zylberberg était une personnalité singulière et attachante de la communauté française, mais qui, à la fois, a vécu pleinement sa vie taïwanaise.
Pour l’enseignement du français à Taiwan,Françoise Zylberberg a ainsi joué un rôle déterminant. Enseignante de français langue étrangère à l’Université de Paris 7, elle est arrivée à Taipei en 1979, recrutée par l’Université nationale de Taiwan, où elle a enseigné jusqu’en 2006. Beaucoup se souviennent encore de son émission télévisée « Salut les copains ». Cette émission était à l’époque une petite révolution dans l’enseignement du français sur l’île, par le ton très libre qu’elle adoptait notamment. Son succès fut tel que les responsables de l’enseignement du français à l’étranger adoptèrent son modèle dans plusieurs pays.
Si Françoise Zylberberg ne fut pas la première enseignante de français à Taipei, j’ajouterai néanmoins que son rôle dans la diffusion de notre langue revêt une dimension particulière. Son engagement commence dès 1969 dans son université d’origine, lorsqu’elle inaugure un cours de français langue étrangère destiné à un public sinophone.
Dès lors, si Françoise Zylberberg a compté parmi cette poignée de pionniers qui furent à l’origine de la coopération culturelle franco-taïwanaise dans les années 70, elle en est demeurée jusqu’au bout une actrice majeure, notamment à travers ce qui reste l’une de ses plus belles réussites : la librairie « Le Pigeonnier ».
En Asie, on compte sur les doigts d’une main les librairies françaises. Le Pigeonnier est bien plus qu’une librairie. Le Pigeonnier est un espace de partage, de rencontres. Françoise Zylberberg y conviait régulièrement des auteurs français ou francophoneset y organisait des débats. Mais elle a fait également du Pigeonnier l’un des partenaires incontournables des éditeurs français et taïwanais, à travers le salon du Livre notamment, dont la France fut l’invitée d’honneur l’an passé. L’investissement de Françoise Zylberberg pour le livre et l’écrit, à travers la librairie, comme dans le domaine de la publication, a d’ailleurs été honoré en marge du Salon du Livre à Paris, au printemps dernier, lorsque Françoise Zylberberg s’est vue remettre les insignes de Chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres au Centre national du Livre.Outre sa vocation première de librairie, Françoise Zylberberg avait également fait du Pigeonnier une maison d’édition, au catalogue riche et varié, des cartes postales à la philosophie, de la bande dessinée aux arts, sans doute la seule de langue française en Asie.
Le Pigeonner est une librairie presqu’unique en Asie par son implication dans le monde de l’édition française. C’est aussi une librairie véritablement taïwanaise, en ce sens qu’elle s’adresse d’abord au public taïwanais et non pas seulement au public français installé sur l’île ou de passage.Elle fournit par exemple en livres français les bibliothèques de plusieurs universités taiwanaises. Son site internet permet au public taiwanais de se tenir informé des publication françaises et commander directement les titres qui l’intéressent.
La maladie qui a emporté Françoise Zylberberg lui a toutefois laissé le temps de former une équipe solide et très professionnelle. Je n’ai aucun doute sur l’avenir de la librairie qui est un partenaire de la coopération franco-taïwanaise et qui le restera.
*Entretien de l'ambassadeur de France Patrick Bonneville, Dr de l'IFT, avec l'agence de presse CNA Lo YuanShao (août 2010)
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