Nerval lui-même qualifiait ce recueil de "descente aux enfers". Texte aux accents ésotériques souvent obscurs, Aurélia ressuscite le mythe d'Orphée en une succession de rêves prophétiques et de délires visuels dont les surréalistes devaient faire leur miel. Dans "son petit habit brun de toiles d'araignées", Nerval côtoie sans cesse la folie et, cas unique en littérature, s'y abandonne humblement, en toute lucidité. Même Rimbaud n'ira guère plus loin. Écrivant comme sous la dictée de forces surnaturelles, dans un style haletant, précipité (il se suicidera peu de temps après), le poète se dépouille sans regrets de tous les artifices du réel. Le rêve seul peut répondre à ses questions hallucinées. Images apocalyptiques, cris déchirants ("L'univers est dans la nuit"), Nerval, au fil d'errances sans soleil, cherche à la fois les fantômes de sa mère et de son amour disparus. Il crée pour finir un chef-d'oeuvre unique, une étoile solitaire, et trouve là l'immortalité tant désirée.
|