Les Mémoires de Berlioz tracent le portrait exemplaire d'une sensibilité à l'époque romantique. Né en 1803, Berlioz est le contemporain de Hugo, de Delacroix
et l'aîné de quelques années de Mendelssohn, Chopin, Liszt, Schumann et Wagner ; il demeure cependant une figure isolée dans le paysage musical français et la singularité flamboyante de son ouvre suscite en France ironie et scepticisme. Trop souvent, le récit des triomphes sans lendemains alterne sous sa plume avec des échecs cuisants. Contraint de tenir le feuilleton musical du puissant Journal des débats, le compositeur s'est fait des ennemis par son intransigeance l'ace à la médiocrité de tant de créations contemporaines et au laxisme dans l'exécution des ouvres qu'il révère chez Beethoven, Gluck ou Weber. Des voyages mènent ce chef d'orchestre émérite à travers l'Europe et jusqu'en Russie, tandis que l'appui généreux de Liszt lui ouvre l'Allemagne des princes mélomanes. Berlioz revient alors à Paris comblé d'honneurs et de quelques profits, retrouvant l'obsédant feuilleton et une épouse malade, Harriet Smithson, qui fut, au théâtre, l'inoubliable Juliet de Shakespeare, l'inspiratrice de la Symphonie fantrastique... Les dernières années du compositeur sont assombries par les vicissitudes de son grand oeuvre, Les libyens, qu'il ne vit jamais intégralement représenté. Une flamme brille cependant encore en lui : son amour d'enfance pour Estelle Fornier qu'il revoit enfin - dernier épisode, peut-être le plus émouvant, de ces étincelants Mémoires.
|