" Il a fallu que Dieu s'engouffrât dans l'humanité, et qu'à un moment précis de l'histoire, sur un point déterminé du globe, un être humain, fait de chair et de sang, ait prononcé certaines paroles, accompli certains gestes, pour que je me mette à genoux. Si le Christ n'avait pas dit : " Notre Père... ", je n'eusse jamais eu de moi-même le sentiment de cette filiation ; cette invocation ne serait jamais montée de mon cœur à mes lèvres. Je ne crois qu'à ce que je touche, qu'à ce que je vois, qu'à ce qui s'incorpore à ma substance, et c'est pourquoi j'ai foi dans le Christ. Tous les efforts pour réduire en lui la condition humaine vont à l'encontre de ma plus profonde tendance, et sans doute y faut-il rattacher mon obstination à préférer au visage du Christ-Roi, du Messie triomphant, l'humble figure torturée de l'homme que, dans l'auberge d'Emmaüs, les pèlerins de Rembrandt reconnaissent à la fraction du pain, notre frère couvert de blessures, notre Dieu. "
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