Le patrimoine commence et demeure là où nous naissons, marchons et vivons. À Arles, mes yeux possèdent tout. J'en reconnaîtrais entre cent mille les pores drus de la pierre douce, le profil des rues, la physionomie des façades, le regard des fenêtres. c J'entends » Arles (les trains portés par le mistral, les claquements du vent, mots de là et pas d'ailleurs, bruits et rumeurs des Lices, clameur et fureur des arènes, glas des heures). Arles se « touche » (parapets rugueux, marbres lisses, ferronneries rafraîchissantes), se « respire » (l'air de la mer et de la Camargue au-dessus du Rhône, les figuiers de la canicule, l'humidité des palais obscurs) et se « goûte » (mais là on n'en finirait pas, de l'ail à l'anis). Le patrimoine, c'est tout cela et aussi le caractère si particulier que ces pierres perpétuent chez ceux qui les habitent (rétifs, excessifs, exigeants, indolents, pudiques, excentriques), leur travail, l'Histoire et les histoires de toutes ces familles, sagas locales ou cultures d'adoption... Arles est populaire et impériale, rustique et aristocratique, chrétienne et païenne, modeste et orgueilleuse, classique et traditionnelle, brusque et baroque, austère, échevelée. Apollon et Dionysos. En noir et blanc et en couleurs...
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